PETITES CHRONIQUES DU CLIMAT À ST-SIGISMOND
par Jean-Marc Reboul
Il est évident qu’aujourd’hui en France nous souffrons beaucoup moins du froid qu’il y a 200 ans où les températures pouvaient parfois descendre en dessous de zéro à l’intérieur même des maisons.
Hiver, vous n'êtes qu'un vilain, / Été est plaisant et gentil,
En témoin de Mai et d'Avril / Qui l'accompagnent soir et matin.
Ces quatre premiers octosyllabes du poète Charles d’Orléans (mort en 1465) témoignent des souffrances endurées par la population au coeur du « petit âge glaciaire » ayant eu lieu du début du XIVe siècle à la fin du XIXe siècle.
L’historien observe un « transfert » symbolique entre l’hiver et l’été. La saison du givre et des plaines blanchies était perçue par nos ancêtres comme la plus redoutable. Désormais, c’est l’été et ses canicules, ses chaleurs écrasantes, handicapantes, que l’on attend avec crainte et que l’on vit avec peine. Mais alors, est-ce que l’hiver se meurt ?
Ces considérations poético-climatiques énoncées, il serait temps de retourner au vécu très local de la petite station météo de St-Sigismond, route d’Agy, altitude 1020 m ! Place aux chiffres !
Décembre avec une moyenne de 3°7 et janvier avec 2°3 furent assez cléments. Mais c’est février qui a battu tous les records avec une moyenne des minima de 2°3, une moyenne des maxima de 9°8, soit une moyenne mensuelle de 6°1 ! La moyenne observée sur 30 ans à St-Sigismond pour le même mois est de 1°5, comme on peut le voir sur le graphique des températures ci-dessous.
On se souviendra aussi de l’épisode de douceur au cœur de l’hiver du 22 janvier au 22 février, avec 2 dépassements du seuil 15° C et peu de jours de gel.
Ces températures anormalement hautes peuvent pourtant nuire aux écosystèmes. Avec les vagues de douceur plus fréquentes et précoces, la nature peut se réveiller avec des jours, voire des semaines d’avance. Les bourgeons apparus trop tôt peuvent être détruits en cas de gel printanier, comme ce fut le cas début avril 2021. Le froid hivernal permet également de détruire certains parasites.
Peu de données exceptionnelles, si ce n’est en décembre, 220 mm mesurés en 15 jours. Le nord de la France a particulièrement souffert, mais des crues et coulées de boue se sont également produites sur la vallée de l’Arve et ailleurs dans les Alpes début décembre.
Épisodes de coups de vent le 22 février avec la tempête Louis qui a balayé la France et dans une moindre mesure, le 29 mars avec la tempête Nelson, accompagnée de sables sahariens.
L’enneigement est resté déficitaire à cette altitude suite à une limite pluie-neige très élevée en raison de la douceur persistante : « seulement » 41 jours avec plus de 1 cm au sol, 13 jours avec plus de 10 cm et 1 jour avec 30 cm. Le précédent record datait de l’hiver 2019-2020 avec 31-11-0.
Le Centre Nordique d’Agy aura connu un de ses pires hivers avec des séances de pluie et de redoux avec pelletages en décembre. Le 1er janvier 20 cm de neige redonne un moment de répit, mais le 26 janvier ce sera la fermeture définitive.
1Il conviendra d’ajouter 21 cm de neige tombée en avril, mesure non disponible lors de la première édition de cet article