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Cirsium arvense
samedi 16 septembre 2023, par
Cirsium arvense , le mal-aimé
Pourtant proche de l’artichaut et du cardon avec qui il partage le même nombre de chromosomes (2n=34), le cirse des champs n’est cependant pas notre ami. Déjà qu’il a le pouvoir d’irriter notre peau, il réussit aussi à irriter les agriculteurs et maraîchers de nombreux pays.
Au championnat des « mauvaises herbes » qui piquent et égratignent, l’équipe des Chardons peut prétendre au podium.
Quand ces envahisseurs se sont installés sur leur terrain, plus question de se promener pieds ou jambes nus, de s’allonger dans l’herbe, d’admirer son jardin et ses cultures, ou de brouter paisiblement si vous êtes du genre vache ou mouton.
Pour les combattre efficacement (car il faut hélas s’y résoudre), le mieux est de bien les connaître.
Voici donc la carte d’identité d’un de ses pires représentants : Cirsium arvense , le cirse des champs. Et surtout, pas de pitié si vous l’identifiez autour de vous !
CLASSIFICATION :
Famille des Asteraceae (Astéracées ou Composées), 23600 espèces !
Sous-famille ou tribu des Cardueae = Cynareae (Carduoïdées), fleurs roses, bleues ou pourpres, toutes en tube
Genre Cirsium, qui compte plus de 100 espèces dans l’hémisphère nord, caractérisé par la présence d’épines et les aigrettes (pappus) aux poils plumeux (à la loupe)
Espèce Cirsium arvense (L.) Scopoli
ÉTYMOLOGIE : du mot grec kirsos, varice et kirsion, nom d’un chardon employé autrefois contre les varices, d’où son nom régional d’herbe aux varices.
Épithète latine arvense, des champs
SYNONYMES : Serratula arvensis L., Carduus arvensis, Cnicus arvensis, Breea arvensis
– Nom français : le cirse des champs
– Noms populaires : chardon des champs, chardon hémorroïdal, chardon des vignes, cirse champêtre, herbe aux varices, sarette, sarrète des champs
– Anglais : Canadian Thistle, Creeping Thistle. Italien : Cardo campestre, Scardaccione, Stoppione. Allemand : Acker-Kratzdistel.
MORPHOLOGIE ET BIOLOGIE
Le Cirse des champs est une plante herbacée vivace très répandue, aux feuilles épineuses et aux fleurs en capitules lilas.
– Plante vivace de 50-120 cm (jusqu’à 1,50 m), dressée, à tige rameuse supérieurement, non ailée, inerme (sans épines), glabre en bas, laineuse en haut.
– Feuilles caulinaires sessiles, quelquefois légèrement décurrentes, jamais embrassantes, raides, vert foncé, glabre sur le dessus, verdâtre à gris-tomenteuses en dessous, oblongues-lancéolées, dentées, pennatifides ou pennatipartites, à bords ciliés-épineux.
– Involucre ovoïde ou subcylindrique, glabre ou à peu près, à folioles moyennes et extérieures lancéolées, aiguës, dressées, à pointe un peu étalée.
– Capitules petits, unisexués (plante presque toujours dioïque), en panicule corymbiforme, fleurs tubuleuses purpurines odorantes (juillet-septembre). Plante mellifère qui attire les syrphes, abeilles et papillons pollinisateurs.
– À maturité, les capitules femelles portent une grosse touffe de soies blanches (les aigrettes). Les fruits du cirse des champs sont des akènes allongés munis d’une aigrette (pappus) à soies plumeuses, facilement disséminés par le vent (anémochore)
– Racines : au départ, une racine pivotante d’où partent des racines latérales rampantes (rhizomes blanchâtres, horizontaux, profonds) et produisant pour la pérennité de la plante de nombreux bourgeons adventifs. Ce système racinaire explique que les populations deviennent des "ronds" plus ou moins circulaires, de plus en plus étendus.
FORME DE VIE
Plante géophyte, dont les bourgeons portés par des rhizomes sont enfouis dans la terre. La partie aérienne de la plante disparaît pendant la saison défavorable et les organes de survie qui sont dans le sol peuvent ainsi résister à des conditions difficiles. Ils donnent naissance à des rosettes au printemps, puis produisent au début de l’été des tiges dressées qui peuvent s’allonger de 3 cm par jour.
ÉCOLOGIE ET CHOROLOGIE
– Étages de végétation : collinéen, montagnard, (à subalpin)
– Plante de lumière, héliophile
Stations, habitats : Plante rudérale (qui pousse spontanément dans des milieux marqués par une activité humaine), plutôt nitrophile. Champs, chemins, lieux incultes, décombres ; très fréquente.
Plante neutronitrocline : Qui apprécie un sol neutre et assez riche en nitrates.
Répartition : Eurasiatique, presque toute l’Europe, Asie Mineure, Sibérie, Chine, Japon Canada, États-Unis, ....
Plante adventice envahissante très nuisible pour les cultures, se propageant très vite par ses rhizomes difficiles à extirper et, dans les sols cultivés, par fragments de racines.
Les plantes adventices regroupent toutes les espèces qui croissent sur un terrain cultivé sans y avoir été semées et s’y multiplient momentanément. Elles sont gênantes pour la culture en place, en détournant, à leur profit, l’eau et la lumière. Elles peuvent aussi héberger de nombreux ravageurs et transmettre des maladies nuisibles aux cultures. L’impact économique de cette concurrence se manifeste, à court terme, par une diminution des rendements et, à long terme, par l’augmentation du stock semencier du sol. De plus, le coût du désherbage chimique représente l’une des principales dépenses pour l’agriculteur, en particulier dans le cas du colza ou de la betterave sucrière. Parmi les ennemis des grandes cultures, les mauvaises herbes occupent une place importante.
HÔTES et ENNEMIS
Bien sûr, le célèbre Chardonneret élégant Carduelis carduelis qui, avec son long bec pointu s’est spécialisé dans la recherche de graines difficilement accessibles comme celles des chardons et des cirses, en automne et en hiver.
Le cirse fait partie du menu du campagnol des champs, Microtus sp..
Les vaches ne le broutent pas, mais avant la floraison et non monté, les ânes peuvent l’apprécier.
Le chardon des champs est attaqué par une quarantaine d’espèces d’insectes, dont une moitié s’attaque aux tissus internes des parties aériennes (collet, tige, feuilles et capitules) et l’autre moitié aux tissus externes. Un petit nombre ne s ’attaque qu’aux racines.
– Acariens ériophyides (Eriophyoidea), Aceria anthocoptes
– Parasites : Urophora cardui (L. 1758)
– Pucerons aphidiides (Aphidiidae)
Larinus planus est une espèce d’insectes coléoptères de la famille des Curculionidae (Charançons) classée dans la tribu des Lixini. Elle est originaire d’Europe centrale et d’Europe de l’Est, jusqu’au Caucase, et s’étend au nord jusqu’au Danemark et au sud de la Norvège, mais s’est aussi répandue dans les années 1970 à l’est des États-Unis. Elle est utilisée en Amérique du Nord pour lutter contre l’invasion du cirse des champs, mais s’étend aussi à Cirsium undulatum, cirse endémique du centre et de l’ouest de ce continent.
CUEILLETTE ET USAGE CULINAIRE
D’une manière générale, toutes les espèces de cirse, des jeunes pousses aux involucres en passant par la moelle de la tige et la nervure centrale des feuilles sont comestibles (surtout chez le cirse maraîcher, Cirsium oleraceum). La difficulté consiste à atteindre les parties tendres sans s’égratigner.
Les toutes jeunes tiges sont bonnes crues, lorsqu’elles sont encore bien tendres. Leur saveur est à la fois sucrée et salée, un peu comme l’artichaut.
PROPRIÉTÉS MÉDICINALES
Comme tous les cirses, la plante est peu utilisée à des fins médicinales.
Les akènes contiendraient des alcaloïdes toxiques, et on trouve de l’inuline dans les parties souterraines.
Le cirse des champs renferme un glucoside donnant sous l’action de l’enzyme de l’acide cyanhydrique, un second glucoside, la tiliacine, également présente dans les fleurs de Tilleul.
Les fleurs, qui contiennent une présure, ont servi à coaguler le lait, comme celles d’autres chardons.
Récemment, un procédé permettant d’obtenir, à partir du Cirsium arvense, un extrait enzymatique de C-protéase coagulant a été décrit. On a déterminé les propriétés physiques, chimiques et biochimiques de cet extrait en les comparant avec les propriétés correspondantes de la présure. La C-protéase s’est montrée la plus stable à la chaleur de toutes les enzymes coagulantes connues jusqu’à ce jour. A des températures comprises entre 30° C et 50° C l’enzyme obtenue se comportait d’une manière semblable à celle de la présure ; pourtant, elle révélait des propriétés protéolytiques marquées au-dessus de 50° C et, à partir de 60° C, l’augmentation de l’azote non protéique devenait proportionnelle au temps. L’aptitude de la C-protéase à hydrolyser les protéines à 100° C environ peut rendre de grands services. Le Cirsium arvense représente une matière première peu coûteuse et facile à se procurer pour la production d’une préparation enzymatique.
(S. POZNANSKI, A. REPS and ELZBIETA DOWLASZEWICZ, Propriétés coagulantes et protéolytiques de la protéase extraite de Cirsium arvense,
Institut du Génie et de la Biotechnologie Alimentaire Université Agricole d’Olsztyn.)